Créer de l’excitant à partir de l’existant : l’univers d’Alexandra Remise
Lorsqu’on se lance dans une nouvelle étape professionnelle, entre la remise en question et la mise en action, il y a souvent un laps de temps mystérieux. Et un jour, c’est le bon jour pour plonger. On ferme les yeux et on “lâche les chiens”.
Pour Alexandra, ce jour-là arrive en juillet 2024. Elle lance La Remise, un projet difficile à décrire en un mot puisqu’il regroupe tout ce qu’elle aime. Des objets chinés remis au goût du jour (surtout des lampes), des mises en scène uniques, des couleurs franches, des photos de fin de journée en pleine cambrousse.
“Je rénovais ma maison, et pour la décorer, je cherchais notamment des lampes : j’avais en tête une idée précise, la petite lampe anglaise que tu trouverais dans une brocante, mais qui est déjà hyper mignonne, grâce à un joli assortiment de couleurs et d’imprimés, un mariage joli-bizarre mais qui, étonnamment, fonctionne”, m’explique-t-elle. Elle se rend vite compte qu'une lampe comme ça, bah, ça ne se trouve pas ! Alors, elle se retrousse les manches.
Au départ, elle veut simplement faire une lampe pour elle. “Mais, comme je suis un peu “extrême”, au lieu de faire une lampe, j’ai commencé par chiner 15 pieds de lampe, sans savoir ce que j’allais vraiment en faire”. Elle en ponce une, puis, petit à petit, commence à bidouiller, apprend à électrifier, fabrique un abat-jour. Après quelques coups de jus et un peu de pratique, sans trop s’en rendre compte, sa lampe prend vie. Jusqu’au jour où elle en fait une de A à Z. Jouissif !
Ce que j’aime particulièrement avec La Remise, c’est qu’Alex transforme des lampes qui, comme ça, n’ont pas d’avenir “stylé” (“Quoi ?, qu’est-ce que tu vas faire avec ça ?” lui demandait sa mère quand elle lui montrait ses trouvailles en brocante). Et elle, de rassembler tout son aplomb et d’affirmer “Si si, je vois ce que ça peut devenir”.
“Je fais ce projet autant pour créer des produits que pour créer de belles images” me raconte-t-elle. Pour son premier shooting, qui était prévu en mai dernier, Alex avait en tête une scénographie précise, de fin de journée, avec une lumière rasante, un soleil qui réchauffe. Le temps n’étant pas au rendez-vous, ce sera pour juillet. “Avec ce projet, je me réapproprie le temps. Je ne me soumets pas à un calendrier saisonnier, à des sorties de collections, à un nombre de posts Instagram. Avec La Remise, j’ai voulu m’affranchir des “il faut”.”
Ce qui l’anime avec La Remise ? “Le fait de pouvoir m’exprimer aussi librement dans la DA, de faire ce que je veux.” La seule contrainte qu’elle s’impose, et qu’elle aime par-dessus tout, c’est de partir de l’existant et de ne pas avoir à gérer un “cercle infernal” de production qu’elle a pu connaître dans ses autres expériences professionnelles. Devant chaque lampe, elle se pose la question : qu’est-ce que je peux bien imaginer à partir de ce pied torsadé ?
C’est l’aspect upcycling qu’Alex semble apprécier. Alors oui, mais elle n’adore pas le terme. “Avec l’upcycling, il y a un côté “bidouille”. J’aime l’idée que les gens achètent un article comme s’il était neuf. Qu’ils aient l’excitation de la nouveauté, mais aussi l’excitation de l'aspect unique. Une double excitation. Le pied de la lampe, la forme de l’abat-jour, la manière de plier le tissu… ça ne sera jamais une fabrication en série.”
Derrière chaque lampe, il y a beaucoup de travail. L’artisane en herbe -qui, il y a encore quelques mois, était persuadée de ne rien savoir faire de ses dix doigts-, choisit des pieds de lampes en bois tourné, ponce chaque petit recoin à la main pour enlever le vernis qui date de 40 ans et qui n’est franchement pas esthétique. Un boulot plutôt physique et ingrat.
Très vite, elle a voulu mettre de la couleur et du brillant, pour une touche british et nordique - sauf bien sûr, quand le bois est beau et qu’il n’a pas besoin d’un lifting. “J’ai toujours eu une obsession du rouge. Pour moi, le rouge réveille tout, dans les photos aussi. J’aime aussi beaucoup le vert et le bleu, sûrement parce que je ne vois que ça depuis que je vis à la campagne depuis trois ans. Le vert des champs, le bleu du ciel.”
Pour toutes les personnes qui n’osent pas mettre de la couleur par trop grandes touches chez elles, les lampes La Remise sont le grain de folie idéal : un petit objet mais qui y va franco dans les couleurs et les motifs. Qui vient réveiller un intérieur sage. Ces lampes ne sont ni tendance ni ringardes : vous en mettez une sur un petit chevet, dans une bibliothèque, et vous ne vous en lasserez pas dans 20 ans. “Il y a un truc “désuet moderne” : le désuet aide à traverser le temps et le moderne t’aide à aimer l’objet maintenant.”
Comment Alex garde-t-elle son originalité, comment arrive-t-elle à ne pas se faire aspirer par tout ce qu’on voit sur Insta et à garder sa personnalité ? “Quand je consomme beaucoup Insta, ça ne me rend pas bien. Donc il y a des phases où je me sors du réseau. J’essaye de me nettoyer le cerveau, avec la nature ou en faisant des “activités” plus traditionnelles : en allant voir des éditeurs de tissus, faire des brocantes, regarder des livres de photos. D’être plus dans la réalité des objets.” Elle ne cherche pas à être trop nourrie en quantité : “Il se passe déjà beaucoup trop de choses dans mon cerveau ! Je cherche simplement l’étincelle, le petit truc qui m’éveille. Il y a quelque chose qui va craquer l’allumette et là, je vais avoir plein d’idées.”
Lampes La Remise à partir de 189€
Un nouvel arrivage de lampes est prévu ce soir à 21 h sur son compte Insta.
À la fin de notre discussion, j’ai demandé à Alex ses marques, créateurs, créatrices coups de coeur.
- “Une céramiste que j’aime particulièrement : Julie Perrot et sa marque Amouramour”.
Céramiques Amouramour
- “Immense passion pour Landy Rakoto, une autre céramiste -pour sa vaisselle mais aussi ses magnifiques lampes. Sa soeur, Kalo, ébéniste basée à Bruxelles est également très douée.”
Landy Rakoto
- “Hermine Torikian : j’adore la modernité qu’elle a apportée au travail de marqueterie qui est un artisanat qui avait une image assez poussiéreuse !”
Hermine Torikian
- “Justine Menard : son travail bouscule lui aussi un art parfois perçu comme kitsch (le soufflage du verre) et donne naissance à de mini-sculptures du quotidien. Poétique à souhait (et toujours cette présence des « boules », un motif récurrent dans les objets que j’aime et donc dans les pieds de lampe que je travaille !).”
Justine Menard
- “Fan du travail de l’artiste Shaskia Stacy Cuaspa, de ses couleurs et des proportions données aux personnages.”
Shaskia Stacy Cuaspa
- “Fan aussi du travail de tableaux-céramiques de Rosi Mistou : sa palette de couleurs qui me fait vibrer.”
Rosi Mistou
- Maison Moche : “Une amie qui réalise des collages et qui a conçu mon identité graphique. Elle travaille les couleurs de manière instinctive et joyeuse. Elle fait des très belles choses avec trois bouts de papier”.
Maison Moche