Vivre dans une tente géante

Tentes XXL de Natalia Sly et Pepi de Boissieu, au Portugal

J’ai découvert Natalia Sly via le studio de création Dora Daar qu’elle a créé avec sa très bonne amie Pepi de Boissieu. J’avais trouvé magnifique leur tapis rond “Oraculo” (photo ci-dessous), pensé pour les retrouvailles à l’ombre des arbres. Plus récemment, je suis restée scotchée devant les tentes estivales XXL qui leur servent de maison pour l’été.

Rencontre (téléphonique).

Tapis Oraculo, Dora Daar

Peux-tu me raconter comment vous avez eu l’idée de ces tentes ?

Natalia Sly : Quand le Covid est arrivé, on habitait à Lisbonne et on voulait s’entourer de plus de nature. On a trouvé un bout de terre que l’on a acheté à trois. Aucun de nous n’avait les sous pour acheter une maison, et surtout, on avait cette volonté de vraiment vivre proche de la terre. Et on ne voulait pas construire. C’est alors qu’un de mes amis de Séville (George Scott Rides, qui fait des “horse riding safari” en Espagne), m’a parlé de ses immenses tentes indiennes. On en a acheté deux et elles sont devenues nos “summer homes”. 

On les installe en juillet et en août. C’est comme une vraie maison, mais en tissu ! On a nos lits, de l’eau, de l’électricité, une douche et des toilettes extérieurs. Quand tu rentres dedans, tu rentres dans une autre dimension. Vraiment. La lumière dans l’après-midi qui transperce le tissu blanc de la tente, c’est magnifique !

L’expérience est très puissante, même ton corps est différent quand il se réveille.

Pour les meubles, vous faites comment ?

Natalia Sly : On a un endroit à côté dans lequel on entrepose tout ce qui va dans les tentes l’été. On a chiné la plupart des meubles. Et on décore le tout avec de beaux tissus. 

Et chez toi, à Lisbonne, ça ressemble à quoi ?

Natalia Sly : Chez moi, c’est tout blanc, avec des touches de couleurs vives. Donc c’est comme une boîte blanche avec de la couleur qui émane des tableaux, des tapis, des plantes, des fleurs, des bougies… Les couleurs me parlent et je leur réponds avec un sourire. 

Aucune couleur aux murs ? 

Natalia Sly : Non, car je me sens plus libre avec les objets. J’aime changer de couleur en fonction de ce que je ressens, donc une seule et même couleur me rendrait un peu claustrophobe. Je le vois, les couleurs ont des effets sur moi !

Tu peins aussi des tableaux avec beaucoup de couleurs.

Natalia Sly : Oui, j’y pense depuis longtemps et je me suis enfin lancée. J’ai grandi dans une maison très joyeuse et colorée. Quand je peins, je ne réfléchis pas. Je travaille avec des formes très géométriques, c’est comme si les les lignes me rassuraient. Les couleurs viennent de manière très intuitive : quand je mets un bleu, je sais exactement quelle couleur je veux mettre à côté. L’exercice de simplement voir comment les couleurs dialoguent entre elles me fait du bien. Parfois, on me demande de changer la couleur d’un tableau, mais pour moi c’est impossible ! Ce n’est pas du tout étudié, c’est de l’expression pure, de la méditation, presque. Je ne serais jamais capable de refaire le même rouge ou le même orange.

Ça vient naturellement. Il faut faire attention à tout ce qui vient naturellement à vous, c’est là où vous êtes talentueux, c’est là ou vous serez bons ! 

J’ai l’impression que les bougies font vraiment partie de ta déco. Tu les allumes un peu tout le temps, même en pleine journée, ce qui est moins naturel pour moi. D’où ça vient ?

Natalia Sly : Mon grand-père venait de Grèce et j’y allais beaucoup petite. La-bas, dans les villages et les églises, il y a toujours une bougie allumée, à n’importe quelle heure de la journée. J’aime le côté sacré de l’objet. 

Chez moi, j’en mets partout. Sur ma table de salle à manger qui me sert de bureau, dans mon salon… Je les allume dès le petit déjeuner. Quand le soleil se lève et qu’il fait encore un peu nuit, plutôt que d’allumer une lampe, j’allume une bougie. La lampe, c’est plus brutal, trop direct, trop “boom, lumière, plein phares !”. 

Avec Dora Daar, on avait sorti un porte-bougie en collaboration avec la marque barcelonaise Après Ski (photo ci-dessous) que l’on avait appelé “Helios Selene” (the moon and the sun) pour rendre hommage au rythme naturel de la journée, à cette lumière si particulière de l’aube et du crépuscule. L’objet faisait aussi référence à la culture grecque. Les Grecs croyaient que la pleine lune leur portait chance et faisaient pour cela des offrandes à Artémis, la déesse de la lune : en allumant une bougie, ils formulaient leurs vœux en croyant qu'une fois soufflée, la fumée porterait le message dans l’au-delà. 

Tu parles souvent de rituels, qu’est-ce que ça veut dire pour toi ?

Natalia Sly : Souvent, j’ai l’impression qu’on se dit qu’il faut faire beaucoup de choses et avoir une vie très intense pour ressentir des émotions. Mais parfois, je trouve que plus on en fait, plus on est dans l’attente de quelque chose, qui en fait, ne vient jamais. Moi, ce sont les petites choses qui me procurent le plus de plaisir. Allumer une bougie justement, m'allonger dans mon canapé, boire du thé, écouter de la musique, lire un livre. Avec mon fils, on joue souvent au jeu “let’s live like in the old days”. On n’utilise pas d'électricité pendant un jour et on s’amuse ! 

Qu’est-ce qui fait que tu te sens bien chez toi ?

Natalia Sly : À l’instant où je te parle, je suis assise sur mon canapé, et tout ce que je regarde a un sens pour moi. Chaque objet est là pour une raison, avec une intention. Si c’est juste décoratif, ça ne m’intéresse pas, ça ne m’intéresse plus. J’ai des meubles de famille, des choses faites par des amis artistes, des tissus anciens que j’ai ramenés de voyages, d’Afrique, d’Inde, d’Amérique du Sud, du Portugal.

Pour terminer cette interview, as-tu quelques adresses que tu recommandes les yeux fermés ?

Merci à Natalia Sly pour sa disponibilité !

Cette interview a été traduite de l’anglais.

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